La voix a changé. Peut-être qu'elle a mûri - c'est logique - en tout cas, elle s'est découvert de la profondeur, elle a trouvé de l'assurance. L'ambiance n'est plus à la même fièvre : au lieu d'embrasser, mécaniquement, le rythme de la house, Benjamin Diamond adopte maintenant la pulsation d'un amant de la pop, bat pour les riffs de guitare bien électriques. Et, contre toute attente, cela lui ressemble bien davantage. Depuis " Music Sounds Better With You ", le tube du trio Stardust, les années ont filé, Benjamin (re)tente la course en solitaire mais cette fois il a gardé le gouvernail jusqu'au bout. Oublié le costume un peu lisse et clinquant de Strange Attitude, essai initial conçu dans la pression de la french touch et conclu par trop de compromis. Son deuxième album solo (mais le premier dans son coeur). Il en a donné l'impulsion dans son studio perso et, parallèlement à la direction de son label Diamondtraxx (HushPuppies, Nelson, Pilooski, Dirty Diamonds, The Eternals, Octet,). Il a planché dessus deux ans, écrivant l'intégralité des compositions, menant lui-même les séances d'enregistrements avec les sessions de Pet Sounds près de la console. Le temps de se trouver, d'accepter ses envies et, à force de discipline, sa voix. " M'entendre chanter a été difficile ", reconnaît-il, " comme pour un acteur qui serait obligé de se voir à l'écran. "


Mais ce travail sur soi a payé : satisfaisant ses exigences et ses obsessions, le résultat lui colle vraiment à la peau, rendant caduque cette étiquette de " chanteur house ". Si bien qu'au moment de baptiser ce disque, Benjamin n'a pas tergiversé. Out Of Myself, donc. Parce qu'ici il n'y a pas place pour la pose ou l'imposture, le temps presse trop pour cela. Plutôt de se cacher derrière une culture club qui n'a été la sienne que par accident, il a laissé exploser sa fascination pour les orchestrations soignées, les hymnes rock avec une batterie qui claque et des mélodies sentimentales. Et l'air du temps n'y est pour rien. Si on connaissait son amour pour la musique noire et Prince en particulier, Benjamin gardait cachés sa vénération pour des songwriters classiques tels que Bob Dylan ou Ray Davies des Kinks, Arthur Lee du groupe Love, son obsession pour Paul Weller, son respect infini pour New Order.



Ici, toutes ces influences jaillissent comme un geyser mais sont contrôlées par un songwriter aussi solide que sobre. Après l'entrée en matière musclée et ironique "Mr Fate ", se succèdent de tendres déclarations (" Let's Get High ", " Give Me The Grace "), de la pop trépidante et émouvante (" I Wish ", " These Emotions ", " No One Knows "), du rock brûlant (" There Is A Girl ") une ballade poignante ("She's Away "). " A la base, je suis chanteur et compositeur. Alors le style, cela sert juste de prétexte pour exprimer des émotions ". Les chansons d'Out Of Myself ne sont pas autobiographiques mais racontent des histoires qui lui sont proches, des relations qui finissent ou s'épanouissent, des instants du quotidien que chacun grave dans sa mémoire. En guise de fil conducteur, il y a le thème de la nostalgie, celle du passage de l'adolescence au monde des adultes. Mais aucun regret, aucune tristesse, juste un regard distancié et amusé.